Présenté par Tourisme Gaspésie
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Aventures automnales

Pour une virée colorée entre mer et montagnes, on met le cap sur la Gaspésie.

La marche afghane, ou comment méditer en marchant

Les sceptiques seront confondus
Je l’avoue : c’est à mon corps défendant que j’ai fait mes premiers pas afghans. Pas convaincu pour deux sous par le vibrant argumentaire qui venait de m’être servie par Sylvie Alice Royer, fondatrice de Marche afghane Québec et une des rares personnes à enseigner la marche afghane au Québec, je me suis lancé sans grande conviction dans une déambulation sur le rythme de base dit du « 3-1 ». Trois pas d’inspiration, un pas de rétention à poumons pleins, trois pas d’expiration, un pas de rétention à poumons vides et, hop, on recommence le cycle. « Ennuyant », me disais-je alors.

Pourtant, au bout de quelques minutes de ces cabrioles, quelque chose d’insoupçonné se produit : je cesse de pester contre l’apparente vacuité de la tâche. Mieux encore, je me prends au jeu du 3-1, y trouvant une manière inusitée de stopper net le flot ininterrompu de mes pensées. Bref, je suis complètement absorbé par la marche afghane. Et j’aime ça.

Le yoga de la marche
Ce qui distingue la marche afghane de toutes les autres, c’est la place centrale qu’y occupe la respiration, et plus spécifiquement la respiration nasale profonde. « C’est au Français Édouard Stiegler qu’on doit la paternité de la marche afghane, explique Sylvie Alice Royer. Lors d’une mission économique en Afghanistan, ce dernier nota que les caravaniers nomades, réputés pour leur endurance physique exceptionnelle, ne respiraient que par le nez. Il décida donc de les imiter et de baptiser sa technique en leur honneur. »

Le marcheur afghan coordonne chacune de ses respirations au rythme de ses pas. Sur le plat, il peut adopter des rythmes de base comme le 3-1 ou des rythmes plus longs comme le 5-0-7-0 (cinq pas d’inspiration et sept pas d’expiration). En terrains accidentés ou dans des escaliers, il peut davantage opter pour des rythmes courts comme le 2-2 (deux pas d’inspiration et deux pas d’expiration). « L’importance du contrôle du souffle dans la marche afghane n’est pas sans rappeler celui présent dans le yoga. C’est d’ailleurs pourquoi certains la qualifient de “yoga de la marche” », note Sylvie Alice Royer.

D’une simplicité désarmante, la marche afghane peut être apprêtée à toutes les sauces. « C’est une pratique souple qui se transfère aisément à d’autres activités », affirme l’enseignante. Pourquoi ne pas courir afghan ou pédaler afghan ?

Bien-être global
Amélioration de la qualité du sommeil, purification du teint, régularisation du rythme cardiaque : les bienfaits découlant de la pratique de la marche afghane invoqués par ses promoteurs sont nombreux. Or, à l’heure actuelle, aucune étude scientifique ne permet de les avaliser, ni même d’affirmer que ce type de marche se distingue de la marche normale. Malgré tout, les effets qui en découlent sont nombreux.

C’est lors d’une randonnée au long cours que Michel-Pierre Leclerc, travailleur social et adepte de marche afghane, a vu la preuve « irréfutable » de son efficacité. « Lors de l’ascension de longues côtes, le fait de marcher afghan me permettait de littéralement marcher contre l’épuisement. Résultat : j’arrivais en haut de ces dernières fatigué, mais pas à bout de souffle », se souvient-il.

À l’instar de plusieurs autres pratiquants, c’est le bien-être global que lui procure la marche afghane qui plaît le plus à Michel-Pierre Leclerc. Lorsqu’il la pratique, il remise aux oubliettes ses tracas et sombre dans un état méditatif. « C’est une marche consciente qui fait du bien au corps, mais aussi à l’âme », explique-t-il.

Une porte d’entrée vers l’introspection
À la Fédération québécoise de marche (FQM), le phénomène de la marche afghane est peu documenté. « C’est une pratique très jeune dont nous ne connaissons pas encore l’ampleur, dit Dominic Robitaille, agent de communication et de marketing à la FQM. Elle semble néanmoins attirer des gens un peu plus âgés et un peu plus de femmes. Dans tous les cas, si la marche afghane peut susciter l’intérêt de personnes moins portées sur le sport, c’est un plus ».

Ayant lui-même suivi une formation de marche afghane dispensée par Sylvie Alice Royer, Dominic Robitaille dit avoir beaucoup aimé le côté contemplatif de cette technique. « Personnellement, je crois que les randonneurs plus sportifs pourraient y découvrir une porte d’entrée vers l’introspection ».

On aurait le goût d’ajouter : vers une certaine paix d’esprit.

Le point sur la suroxygénation naturelle
Dans son livre La Régénération par la marche afghane, Édouard Stiegler soutient que la marche afghane constitue un moyen de « suroxygénation naturelle ». « Une quantité importante d’oxygène pénètre dans les poumons, mais aussi dans les globules rouges du sang et toutes les cellules du corps. Beaucoup plus qu’en marchant comme tout le monde le fait d’habitude, en utilisant une petite partie de la capacité pulmonaire », écrit l’auteur, avant d’énumérer une foule d’avantages qui émaneraient de cette pratique.

Une affirmation que réfute Patrice Brassard, professeur agrégé au département de kinésiologie de l’Université Laval et chercheur à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec. Selon lui, il est « improbable » que de quelconques bénéfices-santé découlent de cette prétendue suroxygénation.

« Au repos ou à l’exercice, la saturation du globule rouge en oxygène est d’environ 98 % au niveau de la mer », explique-t-il. Un apport accru en O2 à l’organisme a donc peu de chance d’augmenter cette valeur. « De plus, ajoute-t-il, on ne peut pas vraiment parler de “suroxygénation” dans ce cas-ci, mais bien d’une augmentation de la quantité d’oxygène pouvant être diffusé des poumons vers les globules rouges », ce qui n’est pas la même chose.

« Si bénéfices il y a, pense-t-il, ils sont probablement associés au simple fait de bouger »… ou de se concentrer sur sa respiration !
Repères
Marche afghane Québec offre d’apprendre les rudiments de la marche afghane lors d’une série de quatre ateliers d’une durée de deux heures chacune. Il est également possible de suivre un atelier intensif d’une journée. Coûts : 125$ pour la série de quatre rencontres et 150$ pour l’intensif d’une journée.
Info : 418 446-3034 ou www.marcheafghanequebec.com