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Aventures automnales
Pour une virée colorée entre mer et montagnes, on met le cap sur la Gaspésie.
Phénomène marathon
Chicago, 11 octobre 2009, 6 h du matin. Des milliers de personnes se dirigent vers la Lake Shore Drive. Casquette vissée sur la tête, souliers de course rutilants, sourire aux lèvres, elles convergent vers l’aire de départ du marathon de Chicago. La lumière de l’aurore est magnifique. Elle se reflète sur les buildings vitrés du centre-ville. L’architecture de la plupart des bâtiments de ce secteur de la ville est éblouissante. Les murmures de la foule de coureurs envahissent tranquillement la grande avenue Colombus. Le temps est frisquet (2 °C). Une température idéale pour la «championne» de Québec que j’accompagne. Elle est une des 45 000 chanceux et chanceuses (!) qui ont réussi à se procurer un dossard.
Carey Pinkowski, le directeur de course du marathon de Chicago depuis 20 ans, n’en revient pas encore. «Jamais je n’aurais cru, il y a 20 ans, que ce marathon serait aussi populaire. Auparavant, c’était plutôt réservé aux purs athlètes, mais maintenant, c’est devenu un challenge, une façon de se dépasser pour nombre de joggeurs.» Pinkowski a aussi eu l’heureuse idée de modifier le parcours pour faire en sorte qu’on découvre les entrailles de sa ville. «C’est vraiment un tour de ville à travers ses 29 quartiers. Et c’est un parcours qui permet aux spectateurs de côtoyer les meilleurs coureurs, leurs amis et les membres de leur famille. Au moins 8 endroits stratégiques sont disséminés un peu partout le long des 42,2 km.»
La popularité du marathon de Chicago reflète une tendance lourde aux États-Unis. Selon Running USA (une association de promotion de la course à pied), 9,2 millions d’Américains ont participé à une course officielle en 2008. Une augmentation de 250 % par rapport à 1987. De ce nombre, 425 000 ont couru le marathon et 715 000, le demi-marathon. Les femmes courent de plus en plus: elles représentent presque la moitié des coureurs.
Une telle popularité exerce évidemment un impact économique important. À Chicago, on estime que le marathon rapporte à la Ville des vents plus de 140 millions de dollars. Les participants ramassent aussi plus de 10,5 millions de dollars pour des organismes de charité. Et quel formidable coup de pouce pour le tourisme! L’an dernier, plus de 6200 participants (1000 du Canada) provenaient de l’extérieur des États-Unis.
Imaginez New York maintenant. Un party comme seul la Big Apple peut le faire. Si Chicago est reconnu pour la beauté de son parcours et sa rapidité, New York, c’est le glamour. «Sans les stars, courir, ce serait comme faire du yoga… Ce ne serait pas le sport que nous aimons», confiait l’automne dernier, au magazine Canadian Running, la directrice de course Mary Wittenberg.
Les chiffres associés au marathon de New York sont affolants. Plus de 102 000 personnes ont envoyé leur inscription pour avoir la chance de faire partie du peloton (43 500) à la ligne de départ – le marathon est tellement populaire que, depuis plusieurs années, une loterie est organisée en juin afin de donner une chance à tout le monde de participer à l’événement. On estime ses revenus annuels à près de 30 millions de dollars US. De ce chiffre, une dizaine de millions proviendraient des commanditaires (ING est le partenaire principal), le reste étant divisé entre les droits d’inscription, la vente de produits dérivés et la télédiffusion de l’événement dans plus de 100 pays – une audience de 300 millions de téléspectateurs.
Plus près de nous, les chiffres sont moins ronflants mais tout de même révélateurs. Tenu en mai, le marathon d’Ottawa – un des plus anciens au Canada avec sa première édition en 1975 – connaît un succès inespéré depuis quelques années. On parle de 35 000 participants pour tout le week-end (marathon, demi-marathon, 5 et 10 km). De ce nombre plus de 10 000 participent au demi-marathon, une distance de plus en plus appréciée par les joggeurs sérieux, et 4000 au marathon. Le parcours est magnifique et l’atmosphère, très festive. Et on évalue l’impact économique pour Ottawa à près de 20 millions de dollars, sans compter le million de dollars versés aux organismes de charité (plus de la moitié à l’Hôpital d’Ottawa) grâce aux efforts des coureurs. Selon Tourisme Ottawa, l’événement fait partie du top cinq des festivals de la capitale canadienne pour l’apport de visiteurs étrangers. Durant ce week-end, les hôtels affichent complet et les restaurants du marché By sont pris d’assaut.
Courir au Québec
Au Québec, après le boom des années 1980, c’était le creux des années 1990. Le marathon de Montréal a disparu et la course à pied a fait un peu de surplace. Mais depuis quelques années, une recrudescence semble se dessiner. Selon l’Enquête québécoise sur les activités physiques, sportives et de loisir publiée en décembre 2006, la course à pied est une des activités physiques les plus populaires, la marche et le vélo trônant toujours en tête.
Cela se traduit par un calendrier de courses plus chargé que jamais. Les Québécois et les Québécoises (de plus en plus, elles sont même majoritaires sur les courtes distances) ont retrouvé leurs running shoes. Au marathon de Montréal, en septembre 2009, on a brisé un record pour le nombre de participants aux différentes épreuves de course à pied. «Quinze mille coureurs réunis en même temps dans les rues de Montréal, c’est une première, ça ne s’était jamais vu, explique Bernard Arsenault, le pdg du marathon. Leur nombre a plus que doublé depuis l’an passé. Malheureusement, nous avons dû refuser des inscriptions. L’an prochain, nous aimerions accueillir 20 000 coureurs pour célébrer notre 20e anniversaire.» Avec ses 2200 participants à la distance du marathon, on est encore loin du record de 12 000 établi lorsque Serge Arsenault, frère de Bernard, propriétaire du Canal Évasion et organisateur de deux courses internationales de vélo en septembre prochain, a profité des années d’or du marathon pour inonder les rues de Montréal de ces énergumènes à culottes courtes. Mais, encore une fois, le nombre de participants au demi-marathon (6000) laisse présager une augmentation des effectifs à l’épreuve reine.
À Québec, le marathon des Deux Rives a lui aussi établi un record de participation avec ses 5740 coureurs qui ont foulé le sol du boulevard Champlain, dont plus de 1000 au marathon. Denis Therrien, le grand manitou de cette compétition, voit grand lui aussi. Il vise 10 000 participants d’ici à 5 ans. Québec a un circuit de courses bien établi et quatre clubs reconnus et populaires. «Plus il y a d’épreuves organisées, plus on donne le goût aux gens de courir. Et plus on leur donne le goût de courir, plus il faut organiser d’épreuves», rappelle Denis Therrien.
Robert Poirier, marathonien et propriétaire de Voyages Paradis, n’organise pas des épreuves, mais bien des voyages. L’an dernier, il a amené cinq groupes de Québec aux marathons de Boston, d’Ottawa, de Montréal, de Rimouski et de New York. Il s’occupe de tout et planifie même des tours de ville avec guide pour ceux et celles qui le désirent. «Ce sont des gens qui sont toujours de bonne humeur. J’aime cet esprit de camaraderie. J’essaie de répondre à leurs besoins», explique le très volubile agent de voyages. Il recrute ses clients parmi ses amis, au sein des clubs de Québec, mais aussi parfois sur le pont d’un bateau. «On s’en va en croisière bientôt. C’est sûr qu’on va courir sur le pont avec quelques-uns de mes clients.» Son projet? Il veut amener un groupe de Québec au marathon de Londres en 2011.
Alors, le marathon a-t-il vraiment le vent dans les voiles? «Les gens sont davantage préoccupés par leur santé. Les gouvernements et les entreprises partagent aussi cette préoccupation. À long terme, cela profitera peut-être à la pratique de la course de fond», conclut François Lecot, professeur invité et responsable des stages au Département de kinésiologie de l’Université de Montréal.