Présenté par le MELCCFP
Actualités

Les habitats fauniques : des milieux naturels essentiels

Grâce à la variété et à la qualité de ses milieux naturels, le Québec abrite une grande diversité d’espèces fauniques.

Tendance : : Course à pied

Boston, août 2010. Sur la Freedom Trail, un joggeur se fraie un passage à travers les dizaines de touristes, dont je fais partie. Short de course, cardiofréquencemètre au poignet et ceinture de gourdes à la taille; ce sportif ressemble à tous les autres amateurs de course à pied. Sauf que… «Il ne porte pas de chaussures!» s’écrie mon compagnon de voyage, étonné. Ce détail me laisse un peu perplexe. Boston a beau être une ville propre, il ne me viendrait jamais à l’esprit d’y déambuler pieds nus.
 
Quelques jours plus tard, je croise un autre coureur nu-pieds… en plein centre-ville de New York! Cette fois, l’adepte de course à pied – et la journaliste – que je suis s’interroge: s’agit-il d’une coïncidence… ou d’une tendance?
 
«Courir pieds nus ou avec des chaussures très près du sol, c’est très populaire en ce moment, surtout aux États-Unis. Et la vague commence tranquillement à gagner le Canada», affirme Blaise Dubois, physiothérapeute spécialisé en course à pied, qui travaille à La Clinique du coureur, à Québec.
 
En plus d’avoir travaillé aux côtés d’athlètes de haut niveau à Athlétisme Canada, Blaise Dubois a donné plusieurs conférences sur les bienfaits de courir nu-pieds ou avec des chaussures minimalistes1. «Lorsque j’ai commencé à donner des conférences sur le sujet, il y a sept ans, les gens me percevaient comme un énergumène. Mais aujourd’hui, ils me posent plus de questions et ils sont visiblement plus réceptifs à ce que je dis», raconte-t-il.
 
Selon lui, cet engouement soudain s’explique principalement par le succès du livre Born to Run, du journaliste américain et coureur invétéré Christopher McDougall. Publié en 2009, ce livre a créé une véritable commotion dans l’univers de la course à pied en vantant, notamment, les bienfaits de la course pieds nus. 
 
Liberté pour nos pieds !
«Si on remonte à l’origine, l’homme a été conçu pour se déplacer pieds nus. Avec leurs semelles épaisses et leur rembourrage, les chaussures de course modernes modifient notre façon naturelle de courir», explique François Prince, biomécanicien enseignant au Département de kinésiologie de l’Université de Montréal. En effet, comme le démontre une étude de Daniel Lieberman, de l’Université Harvard2, lorsque nous sommes chaussés, nous sommes portés à atterrir sur le talon. Déchaussés, c’est plutôt la plante du pied que nous posons d’abord sur le sol. Du coup, les chocs sont mieux absorbés, ce qui pourrait diminuer le risque de blessure inhérent à la course à pied. 

Cette réduction du nombre de blessures est également due au fait que nos pieds sont plus alertes lorsqu’ils ne sont pas protégés par des souliers. «Lorsque je cours pieds nus, je sens chaque caillou sur le sol, chaque petite fissure dans le trottoir. C’est un peu comme si je développais un sixième sens», illustre Vanessa Rodriguez, une journaliste torontoise qui a adopté la course pieds nus il y a près de deux ans. Comme le confirme le podiatre Charles Faucher, le pied est une des parties du corps qui contient le plus de terminaisons nerveuses. Celles-ci agissent comme des capteurs qui fournissent au cerveau une foule de renseignements sur le type de terrain sur lequel on se trouve. C’est ce qu’on appelle la proprioception. Avec leurs semelles épaisses, les chaussures modernes bloquent cet échange d’information. Par conséquent, les pieds ne peuvent pas s’adapter de façon optimale à la surface. D’où un risque accru de blessure.
 
Selon le biomécanicien François Prince, la course pieds nus a aussi pour effet de renforcer les muscles du pied, de la cheville et du mollet. «Le support qu’offrent les souliers modernes a rendu cet ensemble musculaire paresseux. Au fil du temps, ces muscles se sont donc atrophiés. Heureusement, il s’agit d’un effet en partie réversible.» Courir sans chaussures, donc sans soutien, est une bonne façon de «rééduquer» nos muscles et, par le fait même, d’augmenter notre performance. «Si on s’en tient aux études réalisées sur le sujet, la course nu-pieds permet d’augmenter la propulsion de 10 % en moyenne», indique le biomécanicien.
 
Mais au-delà des bénéfices physiques quantifiables, il y a plus, comme l’explique l’Américaine Tamara Gerken, cofondatrice et présidente de la Barefoot Runners Society, une association internationale née aux États-Unis qui regroupe des coureurs nu-pieds provenant des quatre coins de la planète. «Quand mes orteils sont en contact direct avec le sol, je me sens libre», lance-t-elle. La liberté est d’ailleurs une valeur profondément ancrée dans le mouvement nu-pieds. Pas étonnant que ce soit le mot qui revient le plus souvent lorsqu’on interroge ses adeptes.
 
Pas une solution miracle
S’il est vrai que la course nu-pieds comporte plusieurs avantages, il ne s’agit pas d’une formule magique. «Se convertir à cette technique demande énormément de patience. Il faut prendre son temps et écouter son corps», reconnaît l’adepte de course pieds nus Vanessa Rodriguez. Ainsi, pour ceux qui sont déjà habitués à courir une bonne distance ou qui ont une vitesse moyenne assez élevée, la transition peut paraître plus pénible, parce qu’elle sera forcément plus longue.
 
Le podiatre Charles Faucher précise qu’une progression graduelle est essentielle pour éviter les blessures. Celui-ci a en effet soigné des patients qui ont voulu se mettre à la course nu-pieds trop rapidement. «Ceux-là, je les appelle les week-end warriors. En une fin de semaine, ils pensent qu’ils vont changer leur vie. Malheureusement, le lundi matin, ils aboutissent dans mon cabinet avec des gerçures, des ampoules et, dans les cas plus graves, avec des entorses ou des fractures.»
 
En plus de la patience, courir dans le plus simple appareil requiert une grande vigilance, puisque les pieds sont directement exposés au moindre objet coupant. Comme le rapporte l’Américaine Kate Kift, une amatrice de course à pied qui n’a pas porté de chaussures conventionnelles depuis environ deux ans, le froid peut lui aussi être une source de danger. «Sans chaussures, nous dépendons du feedback sensoriel que nous renvoient nos pieds. Lorsque ces derniers sont gelés, ils deviennent moins sensibles. Nous atterrissons donc plus durement, ce qui augmente le risque de blessure.»
 
Kate Kift, qui préside également la filiale vancouvéroise de la Barefoot Runners Society, spécifie toutefois qu’avec un entraînement adéquat, il est possible de courir sur pratiquement toutes les surfaces et à des températures sous la barre du zéro. «Pendant une épreuve d’une quinzaine de kilomètres, alors qu’il faisait -6 °C et que la route était couverte de neige et de glace, j’ai moi-même réussi à parcourir pieds nus près des deux derniers kilomètres. C’était très amusant, d’autant plus que la course était commanditée par une grosse compagnie de chaussures!» •

Repères 
Un site qui contient beaucoup d’information sur la course à pied, particulièrement sur 
le minimalisme et la course pieds nus: www.lacliniqueducoureur.com 
Le site de la plus importante association de coureurs pieds nus : 
www.barefootrunners.org (en anglais seulement)