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Aventures automnales
Pour une virée colorée entre mer et montagnes, on met le cap sur la Gaspésie.
L’immensité laurentienne à 3 km/h
Après plus de 25 ans de défrichage, le Sentier national dans les Laurentides est maintenant complété. Voilà une belle invitation à redécouvrir les beautés laurentiennes qu’on tient trop souvent pour acquises. Qu’attendez-vous pour y aller ?
Difficile de trouver un meilleur point de vue sur les immensités laurentiennes qu’en foulant le sommet rocheux de la montagne du Gorille, qui pointe à 545 m d’altitude. Son flanc nord-est, extrêmement escarpé, surplombe les grands espaces verdoyants du secteur La Cachée du parc national du Mont-Tremblant, le massif du mont Tremblant et le lac du même nom.
Bien que, de ce promontoire naturel, on ne s’éloigne pas trop de la frénésie du développement immobilier et commercial des Laurentides, on y ressent la quiétude qu’on retrouve exclusivement dans la grande nature. C’est l’exploit que réussit à accomplir le Sentier national au Québec dans les Laurentides (SNQ Laurentides) sur près de 111 km : nous transporter complètement ailleurs tout en restant ici.
Avant d’entreprendre ma randonnée dans la partie ouest du SNQ Laurentides, je m’attendais à un sentier qui zigzague entre les résidences secondaires de luxe qui envahissent nos forêts. Sur chaque arbre, des affiches « Propriété privée : accès interdit » m’auraient rappelé que mon passage dépendait uniquement du bon vouloir de propriétaires fonciers. Je croyais qu’en dehors du parc national du Mont-Tremblant, les Laurentides sauvages et rugueuses n’étaient qu’un triste souvenir. Heureusement, je me suis trompé.
L’expérience
Situé tout près de la réserve faunique de Papineau-Labelle, le sentier L’Héritage constitue l’entrée ouest du SNQ Laurentides Les premiers mètres se déroulent sur une piste de quad. Ça commence mal, ai-je pensé. Puis le sentier vire rapidement dans le bois. Il n’en ressort que 13 km plus loin, caressant des milieux humides et des lacs totalement sauvages. Au lieu des affiches qui en interdisent l’accès aux randonneurs, on ne croise que quelques écriteaux, peinturés à la va-vite, de chasseurs qui signalent leur présence. Je n’en crois pas mes yeux.
À la sortie de L’Héritage, on arrive au lac Boisseau, un parc satellite du parc d’escalade et de randonnée de la montagne d’Argent. Sur ses rives, zéro résidence secondaire. Que des sites de camping, des canots, des prêts-à-camper et 35 voies d’escalade. Si ce n’était pas des mouches harcelantes, je me croirais dans un rêve. C’est pourtant la RÉALITÉ !
Et ça se poursuit de plus belle. Du lac Boisseau part le sentier Alléluia, 23 km à travers une érablière, une sapinière et des étangs où les castors se sentent dans un safe place. Après une pause ravitaillement à Labelle, suivent les sentiers L’Expédition, Cap 360 et celui de la montagne du Gorille jusqu’à l’entrée du parc national du Mont-Tremblant. Ces vieux sentiers, qui existaient avant que le SNQ ne prenne forme, sont taillés sur le même modèle que les précédents, sauvages et reculés, tout en offrant des points de vue en abondance. Ma réconciliation avec les Laurentides est en marche.
DANS LE PARC NATIONAL
Jusqu’en 2022, le parc national du Mont-Tremblant constituait le trou noir du SNQ Laurentides. Selon Réal Martel, fondateur du Sentier national au Québec, la direction du parc a manifesté longtemps un désintérêt à ouvrir son territoire à la longue randonnée. « Nous comprenions indirectement qu’elle ne voulait pas investir dans ce sentier », dit-il. Pourtant, le premier tronçon du SNQ s’y trouvait : Le Centenaire, inauguré en 1995 pour le 100e anniversaire du parc.
Un élément change la donne : une nouvelle directrice, Mylène Pronovost, entre en poste vers 2020. « Dès que nous l’avons contactée, elle a dit oui », raconte Réal Martel, encore surpris de ce revirement de situation. En peu de temps, Rando Québec, les clubs de plein air et le parc s’entendent sur le tracé d’une longueur de 43 km, le chaînon manquant du Sentier national dans les Laurentides. Ce tronçon emprunte des sentiers et des chemins existants. Pas de nouveaux sentiers à défricher. Que du travail de balisage à faire !
Ce printemps, je n’ai pas pu m’aventurer dans le parc, car la Sépaq a fermé l’arrière-pays à cause des feux de forêt. Par contre, j’ai skié une bonne partie du SNQ Laurentides durant l’hiver, par la Boucle de la Diable. Puis le SNL emprunte des pistes très fréquentées, comme La Roche et La Corniche, où deux belvédères offrent de beaux points de vue, mais fait l’impasse sur Le Centenaire, qui avait pourtant été le premier sentier estampillé SNQ dans le parc. La raison : un problème de droit de passage dans le secteur de La Vache noire, à la sortie du parc.
La nouvelle mouture se connecte ensuite au réseau d’Accès nature Laurentides de Lac-Supérieur avant de rejoindre le Réseau Inter-Centre au chemin du Nordet. Finalement, le SNQ Laurentides termine sa route au lac de l’Appel, où il rejoint la section lanaudoise du Sentier national au Québec, toujours en conservant sa rusticité, sa beauté et son intérêt. Les braves peuvent continuer leur marche jusqu’à la rivière Saint-Maurice et même au-delà.
Un sentier à optimiser
Bien que le SNQ traverse maintenant les Laurentides sans interruption, il reste encore du travail à faire pour l’optimiser. Dans le secteur du parc national, l’itinéraire manque de relief et d’attraits. « Nous avons choisi la voie la plus facile en vue de le terminer, mais il y aurait moyen de le rendre plus attractif », avoue Réal Martel.
Réal Martel et Serge Lacroix, le président d’Accès nature Laurentides, croient qu’il est incontournable que le Sentier national dans les Laurentides mette les pieds sur le massif du mont Tremblant, l’un des reliefs les plus connus du Québec. « Mon tracé idéal commencerait l’ascension du mont Tremblant après la montagne du Gorille, puis grimperait jusqu’au pic Johannsen (930 m) avant de redescendre par le sentier Toit-des-Laurentides », explique Réal Martel. Paraît-il que de vieux sentiers délaissés existent encore. Il y aurait déjà eu des refuges de ski hors-piste dans les parages. Ce rêve sera-t-il un jour réalisable ?
À court terme, non, nous répond par courriel Mylène Pronovost, la directrice du parc. « Le parc national du Mont-Tremblant priorise à court et à moyen terme la consolidation, l’amélioration et la stabilisation de son réseau de sentiers existants plutôt que le développement de nouveaux tronçons. Le défi croissant de recrutement de la main-d’œuvre et le devoir de restaurer des sentiers de manière durable nécessitent une priorisation de nos efforts sur des sentiers privilégiés par la majorité de la clientèle. »
On ne boudera pas notre plaisir pour autant. Le Sentier national dans les Laurentides est bien en selle et vaut le déplacement. Et qui sait ce que l’avenir lui réserve ?
Sentier national des Laurentides
- L’Héritage : 11,8 km
- Alléluia : 22,8 km
- L’Expédition : 7.5 km
- Cap 360 (montagne du Caribou): 5,7 km
- Mont Gorille : 3,8 km
- Ruisseau-aux-Mûres : 1,8 km
- Parc national du Mont-Tremblant : 42,9 km (été, variante en hiver)
- Mont Durand : 1,8 km
- Réseau Inter-Centre : 13,14 km jusqu’au refuge du lac de l’Appel, où le sentier arrive dans la région de Lanaudière
Le Sentier national au Québec
Le Sentier national dans les Laurentides fait partie du Sentier national au Québec, itinéraire pédestre qui traverse la Belle Province, de l’Outaouais jusqu’en Gaspésie. Actuellement, 1650 km sont ouverts. Il manque environ 650 km de forêt à défricher pour terminer le SNQ. Rando Québec assure sa coordination, mais le travail terrain s’effectue en majorité par des bénévoles, comme c’est le cas dans les Laurentides, où plusieurs clubs de plein air, comme Accès nature Laurentides et le Réseau Inter-Centre, ont la responsabilité de sentiers.
EN BREF
Un sentier pédestre ininterrompu de 111 km qui traverse les Laurentides de part en part.
ATTRAIT MAJEUR
La forêt laurentienne.
COUP DE CŒUR
Le camping sauvage du lac Nantel, à Labelle.
Tous les renseignements sur le SNQ se trouvent sur Balise, le répertoire de sentiers de Rando Québec.