Des réservoirs à voir sans réserve
Manicouagan, La Grande, Gouin, Baskatong, Taureau… Pour certains, ces noms évoquent le développement hydroélectrique du Québec; pour d’autres – pêcheurs ou chasseurs –, ce sont des pourvoiries en territoire éloigné. Mais pour les adeptes d’activités de plein air, ils sont plutôt synonymes de sorties en canot ou en kayak, de camping sur des îles, ou de randonnées sur les rives ou dans les hauteurs.
Curieusement, on ne se souvient guère que tous ces réservoirs ont été des terres avant d’être ennoyés par l’homme, emportant dans le courant d’incroyables histoires d’autochtones déplacés, de draveurs courageux, de villages engloutis… Pourtant, à la faveur de barrages construits pour produire de l’électricité, contrôler les crues, retenir de l’eau pour des villes en expansion ou faire flotter du bois, ils sont devenus partie intégrante de notre histoire collective. Aujourd’hui, ils représentent de précieux terrains de jeux, surtout lorsqu’ils s’intègrent à un parc national ou régional, une réserve faunique ou une aire protégée.
Abitibi et Outaouais
Cabonga et Dozois
On les connaît moins que la réserve faunique La Vérendrye, dont ils font partie, à cheval sur les régions de l’Abitibi et de l’Outaouais, mais ces gigantesques réservoirs sont dignement protégés par le statut de réserve faunique, gérée par la Sépaq.
On y trouve des centaines de sites de camping et 800 km de circuits canotables répertoriés sur cartes. La réserve est, du coup, un vrai paradis pour les amoureux de camping sauvage!
La randonnée pédestre est moins privilégiée, mais on trouve tout de même quelques courts sentiers d’interprétation à arpenter, comme celui des Chutes du lac Roland. Deux villages algonquins font partie de la réserve faunique, preuve que l’immense territoire n’est pas si isolé.
www.sepaq.com/rf/lvy
Photo: SDPRM (Parc régional du Lac Taureau)
Lanaudière
Lac Taureau
Parmi les grands plans d’eau québécois, voilà sans doute un des plus connus des amateurs de
canot, de kayak et de camping sauvage. Situé au nord de Saint-Michel-des-Saints, ce réservoir de 95 km2 est né en 1931 après la construction d’un barrage devant alimenter plusieurs centrales, dont celles de Shawinigan et de Grand-Mère. Son récent statut de parc régional de la Matawinie change un peu la donne pour camper gratuitement, mais la protection de l’environnement a son prix!
On aime sa forme de marguerite, sa cinquantaine d’îles, sa kyrielle de plages de sable et ses nombreuses baies. Le parc a aménagé des campings à la baie du Milieu, à celle des Embranchements et à celle du Poste. Pour un beau coup d’œil sur le lac, rendez-vous sur les sentiers de la baie Dominique, longs de 4,6 km! Ceux qui recherchent plus de confort qu’en camping prendront la route de l’Auberge du Lac Taureau, dont la réputation ne se dément pas.
www.haute-matawinie.com/parcregionallactaureau.htm et www.lactaureau.com
Le lac Taureau en histoire
Pour créer ce réservoir, il a fallu que la population du village de Saint-Ignace-du-Lac s’exile, en pleine crise économique. La baie Ignace rappelle cette triste histoire de colons évincés. Toutefois, peu après l’inondation, plusieurs sont revenus s’installer sur les terres épargnées, entraînant la reconstruction d’une école et d’une église.
Côte-Nord
Manicouagan
Ce réservoir de 2000 km2 a la forme bien particulière d’un cratère météoritique. Il a été inondé lors de l’édification du barrage Daniel-Johnson, sur la rivière Manicouagan, pour alimenter les deux centrales de Manic 5, sur la Côte-Nord. La toute ronde île René-Levasseur, en plein centre du réservoir, a tiré profit de son relief pour surgir de l’eau…
Deux zones protégées ont été aménagées sur le territoire, dont une sur l’île centrale (pour empêcher l’exploitation forestière)… Rivière et réservoir Manicouagan sont des secrets bien gardés pour le canot et le kayak-camping en zone éloignée. Tout près, les monts Groulx forment un autre beau site pour des expéditions à pied, l’été, ou en raquettes, l’hiver.
www.mddep.gouv.qc.ca
Hautes-Laurentides et Outaouais
Baskatong
À cheval entre les deux régions, le réservoir Baskatong est lui aussi une vraie mer intérieure formée après la construction d’un barrage, celui de Mercier, en 1927.
La réserve d’eau de 320 km2 s’alimente depuis les centrales hydroélectriques de la rivière Gatineau. Devenu «aire faunique communautaire» en 1998 à des fins de protection de la pêche, c’est aussi un haut lieu du canot-kayak, pourvu qu’on n’ait pas peur du vent quand il se lève!
Le réservoir compte 2800 km de berges et plus de 160 îles. S’y trouvent pourvoiries et terrains de camping, mais on peut encore facilement y faire du camping sauvage. À proximité, les beaux sentiers de la Montagne du Diable, à Ferme-Neuve, avec campings et refuges, permettent de prendre de la hauteur pour aller admirer le plan d’eau.
Enfin, pour se gâter, on peut opter pour un séjour de luxe au Village Windigo, au bord d’une belle baie.
www.reservoirbaskatong.qc.ca; www.montagnedudiable.com; www.lewindigo.com
Photo: Mathieu dupuis/sépaq (Parc national de Frontenac)
Chaudière-Appalaches
Grand lac Saint-François
En voici un dont on ne sait plus s’il est lac ou réservoir! Lac au XIXe siècle, servant à la pêche et à la drave à la tête de la rivière Saint-François, il a été doté d’un premier barrage au début du XXe siècle pour faciliter le flottage du bois, puis de plusieurs autres pour produire de l’électricité.
Situé près de Thetford Mines, il est le troisième plan d’eau en importance au sud du Saint-Laurent, avec 51 km2. La moitié des rives sont protégées par le parc national de Frontenac, gage de belles activités de plein air! Au programme: camping, randonnée pédestre, vélo, canot, kayak ou canot-camping, et ornithologie en tourbière. En prime, pourquoi pas un petit tour sur les sentiers pédestres des 3 Monts de Coleraine, histoire de dominer le paysage, et même camper ou dormir en yourte ou en refuge?
www.sepaq.com
Photo: Nathalie schneider (Kipawa)
Avec les Algonquins, du Témiscamingue
Pour se balader en canot ou en kayak sur le réservoir Kipawa, au Témiscamingue, pourquoi ne pas profiter d’un forfait de quelques heures ou de plusieurs jours en compagnie d’un guide autochtone d’Algonquin Canoe Company?
www.algonquincanoe.com
Mauricie
Gouin et Blanc
Berceau de l’hydroélectricité, la Mauricie compte 32 réservoirs d’Hydro-Québec dans le bassin versant du Saint-Maurice, long de 380 km avec 17 tributaires! Avec l’arrêt de la drave, ces plans d’eau sont devenus de merveilleux terrains de jeux aquatiques. Le réservoir Gouin, qui fait partie d’une «aire faunique communautaire», étend ses tentacules au nord du Haut-Saint-Maurice sur 1789 km2! Reconnu pour la pêche sportive et la motoneige, il est aussi réputé (même s’il est difficile d’accès par la route) pour le camping sauvage et le canot-camping. Une bonne vingtaine de pourvoiries y offrent des séjours de pêche, de chasse et de villégiature.
Baptisé en l’honneur de Lomer Gouin, ancien premier ministre du Québec, il a été conçu dans les années 1920 avec un premier barrage destiné à régulariser le débit de la rivière Saint-Maurice et à optimiser la production d’électricité par des centrales en aval. De nos jours, la communauté autochtone Obedjiwan dispose du seul village sur ses rives; les Attikameks vivaient auparavant près du lac Obedjiwan, qui a été inondé par la mise en eau, et ils ont dû se déplacer…
Le réservoir Blanc est aussi un «lac de barrage» créé en 1930, au nord de La Tuque, par la construction de la centrale de Rapide-Blanc. Au passage, ce rapide du Saint-Maurice a disparu dans l’inondation; le réservoir s’étend désormais sur 82 km2, de la rivière Windigo jusqu’au barrage. Des troncs blanchis envahissent parfois les rives, rappelant l’époque de la drave. Bien que bordé de chalets, d’auberges et de pourvoiries, c’est un lac superbe pour canoter ou faire du kayak, se baigner et camper sur les îles!
www.tourismehsm.qc.ca
Cantons-de-l’Est
Choinière
Il a beau avoir ennoyé des terres agricoles fertiles pour servir de réserve d’eau à la ville de Granby, il y a 29 ans, ce réservoir est l’exemple type d’une transformation en «centre récréotouristique» réussie. Avec ses 4,5 km2, il occupe un tiers du parc national de la Yamaska. Sa longue plage bordée d’espaces gazonnés attirent les familles en pique-nique. La baignade est une des activités les plus prisées durant l’été, mais on peut aussi y faire du canot, du kayak et du pédalo, sans compter la randonnée sur terrain plat et la bicyclette. Les pistes cyclables du parc rejoignent d’ailleurs celle de l’Estriade.
www.sepaq.com/pq/yam