Des amoureux de la forêt /// Toucher la cible
Une forêt boréale, l’automne. Un homme cagoulé, l’œil aux aguets. Camouflé dans la brousse, un arc à la main. Un tueur en série ou un simple chasseur de panache? Pas du tout. Plutôt un artiste unique traquant la bête et l’instant fugace pour mieux faire apparaître l’image qui deviendra tableau.
À 41 ans, Marc Séguin est considéré comme l’un des peintres les plus talentueux de sa génération. Ses œuvres ont déjà fait le tour du monde et partout, les collectionneurs attendent avec impatience chacune de ses nouvelles expositions. Élève de Molinari, admirateur de Riopelle, l’artiste crée un œuvre dense, qui mêle les genres et ne cesse d’étonner. Mais même s’il a installé son atelier à New York, au cœur de la mecque de l’art contemporain, Séguin n’a cure des mondanités et du flafla trop souvent associés à cet univers. Il préfère fréquenter les lieux qui l’inspirent vraiment : sa ferme d’Hemmingford, sa cabane à sucre ou le camp de chasse familial, situé en Haute Mauricie. C’est là qu’il part faire le vide pour mieux refaire le plein. «Nous habitons un pays de lacs, de forêts, d’immensités, et je veux l’assumer complètement. C’est pour ça que j’ai envie de me retrouver en plein dedans. Ici, c’est ma cathédrale, ma banque d’imaginaire. Et il y a un rapport mystique qui s’établit avec la Nature, les animaux.
Mais pourquoi la chasse? «Je peux très bien être bredouille à la chasse. Au moins, j’aurai vécu une expérience intime avec les éléments. Mais lorsque tu attends la bête pendant des heures, en écoutant le silence de la forêt qui respire, et que tout à coup, l’animal surgit dans ton champ de vision, c’est d’une incroyable intensité. Il n’y a qu’en peinture, lorsque l’image à peindre m’apparaît enfin que je peux vivre une pareille euphorie…»