Les offensives citoyennes pour protéger les territoires

illustration : anne villeneuve

Nouveaux condos en vue? Aux armes, citoyens!
Que faire devant le laxisme des pouvoirs publics quand un pan de nature est menacé par un projet immobilier ou un développement quelconque? On se mobilise et on trouve du financement pour acheter les terres convoitées et on les transforme en aire protégée privée, comme le mont Pinacle, dans les Cantons-de-l’Est, ou la nouvelle réserve naturelle Alfred-Kelly, dans les Laurentides. «Même si ces initiatives sont souvent méconnues du grand public, de plus en plus de citoyens se mobilisent et sont portés à se regrouper lorsqu’ils sont mécontents», constate Caroline Cormier, présidente du Réseau de milieux naturels protégés, qui compte une soixantaine de membres au Québec. Et pour ce faire, nul besoin de Facebook ou de Twitter. «Il y a 10 ans, il a été relativement facile de se concerter entre citoyens voisins, dans la petite ville de Prévost, et de se liguer contre le projet de terrain de golf, de condos et de glissades d’eau en bois traité, indique Claude Bourque, président du Comité régional pour la protection des falaises. Sans nous, on aurait aujourd’hui 16 km2 de constructions en lieu et place de la réserve Alfred-Kelly.»

Comme on s’en doute, c’est surtout dans les terrains de jeux des Montréalais que sont la Montérégie, les Cantons-de-l’Est et les Lau­rentides que naissent ces offensives citoyennes, là où les pressions humaines sont les plus fortes, là où des promoteurs disposent d’un bassin potentiel de villégia­teurs et de résidents. Grâce à la mobilisation des citoyens, des propriétaires contigus accordent désormais des servitudes de conservation sur leurs terres, des municipalités embarquent d’elles-mêmes dans des projets de conservation ou de bandes vertes lors du développement du territoire, et il existe des incitatifs fiscaux pour que les propriétaires offrent certains de leurs terrains au bénéfice de fiducies foncières.

Cela dit, il y a un hic: une fois les zones protégées, encore faut-il pouvoir les entretenir et financer leur pérennité, ce qui n’est pas une sinécure. Ainsi, la fiducie foncière du mont Pinacle ne donne accès à ses sentiers qu’à ses membres, pour des activités d’interprétation ou sur demande, tandis qu’un projet de développement de 286 condos risque de voir le jour aux limites du territoire de la réserve Alfred-Kelly, dans la municipalité voisine de Piedmont, faute de liquidités pour acheter les terrains convoités…