Tout feu tout flamme ?
J’aimerais vous suggérer une idée radicale, à contre-courant, mais qui prend tout son sens dans le contexte de la protection de l’environnement.
Et si on bannissait les feux de camp ?
C’est une idée terrible, je sais. Mais donnez-moi l’occasion de défendre la véracité de mes dires.
D’abord, les feux de camp sont très polluants. Déjà, la combustion du bois entraîne des émissions de monoxyde de carbone (CO), d’oxyde d’azote (NOx), de composés organiques volatils (COV) et, surtout, de particules fines, pour ne nommer que ces contaminants. Les feux de camp sont encore pires. Souvent allumés avec du bois humide, dans des conditions à aire ouverte (ce qui crée moins de chaleur), ils polluent davantage qu’un feu dans un poêle à granules.
C’est mauvais pour la santé, particulièrement pour les enfants. C’est aussi mauvais pour la qualité de l’air.
Ensuite, on sait que les forêts sont des puits de carbone. Cela signifie que, durant leur croissance, les arbres captent le dioxyde de carbone (CO2), un des gaz responsables du réchauffement du climat. En brûlant ce bois, on remet donc dans l’atmosphère le CO2 qu’il a capté pendant des décennies, annulant d’un coup les gains faits dans la lutte aux changements climatiques.
C’est mieux, diront certains, que de brûler des combustibles fossiles, comme du gaz. Bien d’accord. Sauf que, de nos jours, la plupart des campeurs font des feux de bois surtout dans un esprit festif. Est-ce vraiment nécessaire ?
Fini la guimauve
Enfin, les modèles climatiques montrent que le réchauffement entraînera davantage de conditions propices aux feux de forêt. Et une des causes importantes de ces incendies destructeurs, après la foudre, sont les feux de camp.
D’ailleurs, chaque année, il y a régulièrement des journées où les feux sont strictement interdits en forêt, justement pour cette raison. En interdisant les feux à l’année, on viendrait éliminer toute confusion possible, ce qui diminuerait certainement de beaucoup les accidents.
En écrivant ces lignes, je réalise que mon propos est dérangeant. À mes yeux, un bon feu est la récompense d’une sortie de camping. Si un ministre présentait un projet de loi pour interdire les feux de camp, je serais le premier à dénoncer son geste.
D’un point de vue social, le feu et l’être humain ne font qu’un depuis la nuit des temps. Interdire les feux reviendrait à attaquer ce que nous sommes. Pourtant, il faut bien admettre que, dans le contexte actuel, ces feux de joie contribuent au problème des changements climatiques. En viendrons-nous un jour à devoir les prohiber? Après tout, les lois visant à bannir les foyers et autres poêles à bois dans les résidences sont de plus en plus sévères. Proscrire les feux de camp ne serait-il pas la suite logique ?
Vous trouvez que j’exagère ? Le ministère responsable de l’environnement s’est pourtant déjà penché sur la question. Voici sa conclusion : « À la lumière de cette étude exploratoire, il importe de se questionner sur l’impact global de la pratique des feux de camp à ciel ouvert, tant sur la nature que sur l’humain.1»
1 Pour consulter cette étude: www.sepaq.com/dotAsset/1688234.pdf