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Aventures automnales
Pour une virée colorée entre mer et montagnes, on met le cap sur la Gaspésie.
Le secret bien gardé de Nakkertok
Sur « l’autre » rive de la rivière de la Gatineau, à un quart d’heure de voiture du centre-ville de la quatrième ville en importance du Québec, se trouve un réseau de ski de fond méconnu qui n’a pourtant rien à envier à personne.
« Il n’est pas beau, notre sport ? » me lance mon cicérone Camille Cheskey, entraîneur-chef du club de ski de fond Nakkertok. Sa question, posée dans un français impeccable quoique coloré d’un léger accent anglais, est purement rhétorique. Pas besoin de faire un dessin pour comprendre que la sortie, qui débute à peine, s’annonce idyllique. Galarneau brille de tous ses feux alors que notre duo s’engage sur la Waterfall, une piste étroite de style classique aménagée dans le secteur sud du réseau, lequel est situé à quinze minutes d’automobile de Gatineau.
Quelques instants de félicité plus tard, mon guide stoppe net, place ses spatules perpendiculairement au sentier et décrète : « C’est l’heure d’un peu de bushwhacking. » Manifestement, la forêt mixte parsemée de lacs gelés, un panorama typique des collines de l’Outaouais, lui fait de l’œil. Ce soudain appel à l’aventure n’est toutefois pas de nature à gâcher mon plaisir. Au contraire, il s’inscrit dans un crescendo ininterrompu de surprises, lesquelles concourent à rendre mémorable ma découverte du centre Nakkertok.
Je m’attendais à me faire snober en raison de mon ignorance. Avec presque 2000 membres, dont près de 300 athlètes, le plus grand club de ski de fond du Canada est reconnu comme une pépinière de champions. Son vaste stade bordé de larges sentiers escarpés propices aux dépassements envoie un message clair : la compétition fait partie de l’ADN de l’endroit, un des cinq homologués au Québec par la Fédération internationale de ski (FIS). Les Championnats canadiens 2021, annulés pour cause de pandémie, devaient d’ailleurs s’y tenir. Même son nom, qui signifie « se déplacer rapidement sur la neige » en inuktitut, sonne un tantinet élitiste.
Je me suis trompé sur toute la ligne. Depuis sa fondation il y a une cinquantaine d’années, Nakkertok ne cesse de s’ouvrir aux fondeurs lambda. Aujourd’hui, on y forme une relève abondante grâce à des programmes d’initiation et de développement comme Jeannots lapins et Jackrabbits (de 4 à 12 ans), Aventuriers (de 9 à 18 ans) et La Petite Expé (Grand Défi Pierre Lavoie). On peut même y pratiquer le ski attelé (parfois appelé skijoëring), alliant le ski et un attelage canin, sur une piste prévue à cet effet.
Surtout, l’ensemble des infrastructures, tels les sentiers illuminés pour le ski de soirée et la boucle de ski enneigée artificiellement en début de saison, la Nakkertrak, sont ouvertes à tous, peu importe leur niveau. « Le volet grand public nourrit le volet compétitif, et vice versa. Nous sommes fiers de notre double identité », expose Camille Cheskey. Un discours rafraîchissant de la part d’un type qui a concouru au niveau national jusqu’en 2011 avant de rouler sa bosse comme farteur en Coupe du monde, puis de travailler au Centre de développement de l’équipe nationale, à Thunder Bay, en Ontario, d’où il est originaire.
Dans l’ombre du voisin
Notre incursion dans la brousse est de courte durée, et nous renouons rapidement avec les pistes officielles. L’objectif : rallier l’extrémité septentrionale du réseau, là où débouche un sentier de 24 km qui connecte les secteurs de Cantley (sud) et de Val-des-Monts (nord). Isolée, cette piste n’est généralement tracée qu’au cœur de l’hiver, à l’occasion de la Weber Loppet organisée par Nakkertok. Faute d’enneigement suffisant, elle ne l’était pas lors du passage de Géo Plein Air au début de février dernier.
Tout le reste du réseau, qui totalise 80 km linéaires, était cependant ouvert. Tissé serré, le secteur sud est composé de pistes sinueuses tracées à la fois pour le classique et le pas de patin, elles-mêmes sillonnées d’environ 10 km de sentiers de raquette pas piqués des vers. Le secteur nord, plus confidentiel, est davantage orienté vers le pas classique. Dans les deux cas, le relief est un brin accidenté : on enchaîne montées et descentes brèves, quoique pentues par moments. Et dans les deux cas, on a un peu l’impression d’être seul au monde.
Hormis une poignée de têtes blanches, en majeure partie des résidents de la province voisine si on se fie aux plaques des véhicules dans le stationnement, je ne croise effectivement que très peu de gens sur les pistes. Les conditions sont pourtant parfaites – neige fraîche, entretien récent, -8 ℃ au thermomètre… L’adresse serait-elle un secret bien gardé ? Il faut porter son regard au-delà de l’autre berge de la rivière de la Gatineau, du côté du parc homonyme, pour esquisser un début de réponse.
« Nous évoluons un peu dans l’ombre de notre voisin, dont la réputation du vaste réseau de ski de fond n’est plus à faire, admet Camille Cheskey. La majorité de ceux qui fréquentent le parc de la Gatineau sur une base régulière ignore tout simplement notre existence. » Cela n’est pas sans conséquence pour ce joyau écologique, victime d’un achalandage monstre mettant en péril ses écosystèmes sans cesse plus fragiles. Comme quoi les Outaouais gagneraient à délaisser quelque peu les larges autoroutes skiables de « leur » parc. Ça tombe bien : Nakkertok vaut amplement le (léger) détour.
Par et pour la communauté
Nous effectuons notre retour par le sentier de la mine Haycok, dont le nom fait référence à un gisement de minerai de fer exploité par la Ottawa Iron and Steel Manufacturing Company de 1872 à 1875 et dont les vestiges sont toujours visibles. Puis nous contournons l’étang Van Wijk et traçons sur le sentier Weber avant de nous arrêter à la cabane Owl pour casser la croûte. Là, sur la galerie orientée franc sud de ce refuge en bois rond, Camille Cheskey me raconte l’histoire des familles qui ont fait naître Nakkertok. (Des panneaux d’interprétation situés à même les pistes permettent aux curieux d’en apprendre davantage.)
Tout commence avec Meg et Hans Weber, à qui appartenaient la plupart des terres de Nakkertok en 1971. C’est sous l’impulsion de ce drôle de couple – elle était une artiste et physiothérapeute britannique tandis que lui était un alpiniste et géophysicien de l’Arctique natif de la Suisse – que le club est né, une corvée à la fois pour ouvrir des sentiers. Leur fils Richard, un fondeur émérite, a représenté le Canada sur la scène internationale et revendique 20 titres nationaux. Il a en outre été parmi les premiers Canadiens à atteindre le pôle Nord à pied (1987) et en ski sans assistance (1995).
En 2003, Dirk et Claudia Van Wijk, deux membres du club, insufflent un second souffle à Nakkertok en rachetant quelque 121 ha de la famille Weber et en acquérant de nouveaux terrains. Leur motivation ? L’amour du sport : Dirk a été membre de l’équipe nationale junior de ski de fond en 1979 et chef des pistes aux Jeux olympiques de Vancouver, tandis que Claudia a été la première femme à obtenir le prix Coureur des bois or dans le cadre du Marathon canadien de ski. C’est dans les années subséquentes que la majorité des infrastructures modernes (stade, chalet principal, toilettes extérieures, hutte de chronométrage…) ont été ajoutées.
L’air de rien, on touche ici à l’essence même de Nakkertok, ce je-ne-sais-quoi qui donne la franche impression que l’endroit exsude la passion pour le ski de fond. « Le club est solidement enraciné dans sa communauté, qui le lui rend bien, affirme Camille Cheskey. Nous avons la chance de pouvoir compter sur d’innombrables bénévoles soudés autour de valeurs similaires de plaisir, de dépassement de soi et d’amour de l’hiver. »
Ce voyage a été rendu possible grâce au soutien de Tourisme Outaouais, qui n’a pas reçu ou approuvé cet article.
Camp de base perché dans les arbres
Le Héron porte bien son nom. Ce petit chalet quatre saisons qui loge deux personnes est construit sur des pilotis évoquant les échasses caractéristiques de l’oiseau éponyme. Y accéder, vous l’aurez compris, exige de grimper. De la route 366, le chemin d’accès rappelle des montagnes russes. Heureusement qu’il est soigneusement entretenu ! Le jeu en vaut néanmoins la chandelle : une fois à l’intérieur de ce nid douillet abondamment fenestré, la vue sur le lac McGregor est époustouflante. On surplombe littéralement l’immense surface d’eau gelée, accessible par l’entremise d’un escalier de 144 marches (bien comptées) un brin casse-cou.
Le Héron et son voisin immédiat, le Huard, constituent les deux premiers hébergements offerts en location par Hom minichalets – six autres ont été inaugurés sur un terrain attenant depuis le passage de Géo Plein Air l’hiver dernier. Surtout, ils sont localisés à relative proximité de Nakkertok, ce qui fait de ces chalets des camps de base tout désignés pour un séjour dans la région. Chaque unité est dotée d’une chambre à coucher fermée, d’un balcon avec spa privé, de planchers chauffants, de tout le nécessaire pour cuisiner, du wifi et même d’une laveuse ainsi que d’une sécheuse.
Dominique Laflamme et Martin Poitras, les copropriétaires de Hom minichalets, ont fait le pari de démarrer leur entreprise à Val-des-Monts en 2018. Une idée brillante : avec ses 125 lacs (!) lovés entre vallées et montagnes, cette municipalité très étendue n’a absolument pas à jalouser ses voisines sises de l’autre côté de la rivière Gatineau. L’hiver est peut-être la meilleure saison pour aller à la rencontre des Montvalois. Le coin de villégiature effervescent durant la belle saison – la population doublerait à cette époque de l’année – laisse alors place à un havre de paix à la nature tranquille, endormie, bref, reposante. À découvrir.
Un terrain de golf, l’hiver
Lorsque la neige recouvre les verts, le club de golf Le Sorcier se métamorphose et devient Le Harfang. Au menu : un réseau balisé de 10 km de fatbike entretenu avec soin sur le domaine de 140 ha. Sur place, 32 bécanes dodues de bonne facture sont offertes en location. On trouve aussi un restaurant, un vestiaire et une érablière de quelques centaines d’entailles où il est possible de faire de la raquette (2 km). Preuve de la popularité du concept, il est prévu que le réseau de vélo à pneus surdimensionnés double son kilométrage cet hiver. Pour vépésistes de tous les niveaux.
Nordik Spa-Nature : arrêt obligé
On dit des installations du plus grand spa en Amérique du Nord qu’elles sont de classe mondiale… et ce n’est pas du tout exagéré ! À visiter après une longue journée à jouer dehors afin de profiter des soins en massothérapie et d’un traitement Källa dans un bassin contenant 10 tonnes de sel d’Epsom – un genre de mer Morte en miniature !
En bref
Un réseau de ski de fond créé par et pour des passionnés.
Attrait majeur
Le secteur sud de Nakkertok au grand complet.
Coup de cœur
Les chalets de type « cabane dans les arbres » de Hom minichalets.