Pagayer sur une rivière oubliée
Traversant une partie des Cantons-de-l’Est du nord au sud, la Missisquoi Nord a miraculeusement préservé son caractère sauvage, comme si elle avait été oubliée de la civilisation humaine. Il n’en fallait pas davantage pour me convaincre d’y aller.
Étais-je attendu dans les parages depuis des décennies ? Il semble que oui. Lors de mon passage, de gigantesques érables argentés formaient une haie d’honneur de part et d’autre de la rivière Missisquoi Nord. Je n’avais jamais reçu autant d’attention de la part d’une forêt. Cette érablière cherchait-elle à tout prix à s’assurer d’un article dans Géo Plein Air ou est-ce, plus prosaïquement, le genre d’hommage qu’elle réserve à tous les pagayeurs ?
Quand on pagaie sur la Missisquoi Nord, on se sent privilégié de faire connaissance avec ce joyau naturel des Cantons-de-l’Est considéré comme un hotspot de biodiversité. Le tracé sinueux de ce cours d’eau de 46 km, qui relie la municipalité de Eastman au village de Highwater, près de la frontière canado-étatsunienne, sert d’habitat à une foule de tortues, de loutres et de castors. Ici, ceux-ci jouissent de la sainte paix, car les eaux peu profondes, fluctuant énormément au gré des précipitations, barrent la route aux bateaux à moteur. Les habitations y sont également rares, voire inexistantes sur des kilomètres. Presque un miracle dans une région aussi développée que les Cantons-de-l’Est.
Si les promoteurs de tout acabit n’ont pas encore fait main basse sur la rivière, les amateurs de plein air, si ! Depuis quelques années, des bénévoles de l’organisme Action Memphré-Ouest, dont la mission est de revitaliser les municipalités situées à l’ouest du lac Memphrémagog – c’est-à-dire Bolton-Est, Potton, Saint-Étienne-de-Bolton et Eastman –, a aménagé des sites, bien identifiés par des affiches bleues, facilitant la mise à l’eau des embarcations propulsées par des pagaies. Des cartes sont disponibles en version papier ou en ligne.
Le parcours canotable de la Missisquoi Nord convient aux amoureux de rivières en quête de zénitude qui possèdent leur propre esquif – aucun locateur n’a pignon directement sur la rivière. Le principal obstacle à la navigation, ce ne sont pas les rapides et les seuils, mais le manque d’eau.
La portion nord de la Missisquoi Nord, longue de 15 km entre Eastman et le parc Duranceau à Bolton-Est, peut être inaccessible par temps sec. Le deuxième segment, qui coule du hameau de South-Bolton jusqu’au village Mansonville, s’avère moins sensible aux fluctuations de débit ; ses plages, ses érables argentés et ses courbes rendent l’escapade vivifiante. La troisième section, courte, se rend jusqu’au confluent avec la rivière Missisquoi, où il est possible de continuer la balade sur 17 km.
Allez donc voir si une haie d’honneur vous y attend…
En bref
Une rivière qui s’écoule sur 46 km dans les Cantons-de-l’Est, à 1 h de Montréal.
ATTRAIT MAJEUR
Son cours méandreux 100 % zen.
COUP DE CŒUR
Les érables argentés qui forment une voûte végétale abritant la rivière.