Le sommet pour tous

illustration: anne villeneuve

Prendre de l’altitude pour fuir les foules? Plus vraiment…
Vous le savez déjà, nul besoin d’être un alpiniste pour grimper au sommet de l’Everest. Si vous avez les moyens – de gros moyens – et une bonne forme physique, on s’occupe de vous offrir le toit du monde sur un plateau d’argent. La preuve: la majorité des «conquérants de l’Everest» d’aujourd’hui n’ont pas d’expérience en montagne. Ce sont souvent des professionnels qui ont réussi, parfois des entrepreneurs qui ont passé la quarantaine et cherchent un nouveau défi à relever. «L’Everest est la plus haute montagne, mais pas la plus difficile, explique l’alpiniste Gabriel Filippi [qui a lui-même été guide sur l’Everest en 2012]. Et les tragédies qui y ont eu lieu ont suscité l’intérêt grâce à des films et des livres qui les ont retracées.»

Ce phénomène d’attraction de la haute montagne est encouragé par la tendance actuelle à installer sur les voies des structures fixes accessibles aux touristes inexpérimentés. «On ne peut pas lutter contre cette tendance, explique Filippi, mais il faut s’assurer que ces grimpeurs soient bien encadrés et que l’expérience soit menée selon un code d’éthique rigoureux vis-à-vis des locaux et de l’environnement.» Cette démocratisation de la haute montagne se fait, bien évidemment, aux dépens des grimpeurs aguerris, qui perdent leur terrain de jeu, mais «j’encourage les gens à poursuivre leur rêve, concède l’alpiniste, s’ils sont honnêtes dans leur démarche».