Les parulines hâtives
Ce sont les premières de la grande famille des parulidés à débarquer au printemps. L’absence de feuilles dans les arbres est un moment privilégié pour observer ces petits bijoux ailés aux couleurs resplendissantes qui virevoltent de branche en branche. Ceux et celles qui s’y connaissent peu en oiseaux auront peine à croire que nos forêts et clairières abritent une si belle faune aviaire.
Quelques arrivantes d’avril…
Paruline à croupion jaune
Dès le début du mois, la paruline à croupion jaune nous revient la première. Cette arrivée précoce s’explique par le fait que le plus gros de ses effectifs ne migre, l’automne venu, que dans les États américains de la côte est et du golfe du Mexique où l’espèce se nourrit, grâce à son système digestif unique parmi les parulines, de fruits cireux encore accrochés à certaines essences d’arbres. En raison du jaune vif du devant de ses ailes et de son croupion, il est facile d’identifier ce petit oiseau qui niche dans les forêts conifériennes et mixtes du Canada.
Paruline des pins
Mi-avril, et voici déjà la paruline des pins rentrant de son hivernage. Elle non plus ne migre pas très loin à l’automne, s’établissant, durant la saison froide, de la Caroline du Nord jusqu’à l’est du Texas. Comme son nom l’indique, cette espèce fréquente les pinèdes dans lesquelles elle nidifie exclusivement. Son chant ressemble au trille monocorde du bruant familier ; un tel air, entendu dans une forêt de pins, appartient fort probablement à cette paruline, sise quelque part dans les hauteurs de son conifère préféré.
Paruline à couronne rousse
Vers la troisième semaine du mois, c’est le retour de la paruline à couronne rousse de son séjour hivernal dans le sud-est des États-Unis et dans les Caraïbes. Coiffée de sa calotte de couleur rouille – visible seulement au printemps et en été –, son poitrail jaunâtre finement rayé, cette jolie paruline se reconnaît d’un coup d’œil. Son habitude de se mouvoir sur le sol ou à faible hauteur dans les arbres facilite d’autant son identification. Un autre trait distinctif ? Sa queue, qui hoche constamment lors de ses déplacements terrestres.
Paruline à gorge noire
Avant qu’avril ne se termine surgit enfin la paruline à gorge noire qui regagne la forêt boréale après plusieurs mois à la chaleur, du nord du Mexique jusqu’au Panama. Vocalisateur invétéré, le mâle entonne aussitôt son caractéristique zi zi zi zou zi, ou sa variante zi zi zou zou zi. Certains vont même jusqu’à répéter cette mélodie des centaines de fois par heure. Abondante, cette paruline niche dans différents types forestiers, de la sapinière à la pinède, en passant pas la cédrière et la prucheraie.
… et du début de mai
Paruline couronnée
Les tout premiers jours de mai amène avec eux un nombre croissant d’espèces de parulidés, dont la paruline couronnée de retour du Mexique, de l’Amérique centrale ou des Caraïbes. De plumage assez terne – à l’exception de sa calotte orangée bordée de noir –, cet oiseau reste le plus souvent au sol, sur lequel il construit un nid en partie couvert rappelant la forme des anciens fours traditionnels – d’où son nom anglais ovenbird. Son chant – un ti-pié, en crescendo puissant – confirme sans ambiguïté sa présence.
Paruline masquée
Mai se montre à peine que la paruline masquée, en provenance du sud des États-Unis, de l’Amérique centrale ou des Antilles, recouvre déjà les taillis en lisière des forêts et en bordure des routes. Le mâle, malgré son masque couleur d’ébène, ne confond personne et est reconnaissable sur-le-champ. Sa ritournelle la plus fréquente, un ouistiti-ouistiti-ouistiti clair et fort, achève de nous le révéler. Sa compagne, dépourvue de masque, vêt un plumage verdâtre, qui en dépit de sa gorge jaune rend son identification malaisée à l’observateur moins expérimenté.
Paruline bleue
Dès la première semaine du mois, un autre parulidé arborant un bandeau sur les yeux revient de son hivernage aux Bahamas ou dans les Grandes Antilles. Il s’agit de la paruline bleue dont le mâle, au visage voilé de noir, est pourtant démasqué illico par son plumage dorsal bleu foncé et sa poitrine blanche. Son chant – un zour-zour-zour-zriiii distinctif – se différencie aisément de celui de la paruline à gorge noire par ses r roulés bien audibles. La femelle, à la livrée tirant sur le vert, ne porte pas le masque ; par contre, elle partage avec le mâle ce petit triangle blanc au bord des ailes.
Paruline flamboyante
Avant même que ne sonne la mi-mai, la paruline flamboyante est de retour au Québec, revenant d’aussi loin que le Venezuela ou le Pérou, en route pour nidifier de part et d’autre du fleuve Saint-Laurent. Si le mâle se drape de couleurs identiques à celles de l’oriole de Baltimore – l’orange et le noir –, la femelle, de plumage aux teintes douces, est beaucoup moins tape-à-l’œil. Qu’à cela ne tienne, le mâle est néanmoins charmé par ces dames, lui qui s’accouple chaque saison avec deux femelles, un phénomène appelé polygynie.
Pierre Bonneau est rédacteur en chef du magazine Nature sauvage.