S’entraîner le soir… et dormir
Le sommeil est une petite bête timide : un rien suffit à l’effrayer, comme lorsqu’on s’entraine quelques heures avant d’aller dormir.
Faire de l’exercice en soirée ou bien dormir, tel est le cruel dilemme auquel bien des gens sont confrontés malgré eux. La trame narrative est à peu près la suivante. À la fin de votre journée de boulot, vous avez la ferme intention de vous dépenser. Course à pied ? Escalade ? CrossFit ? Peu importe, l’idée est de pousser la machine afin d’en retirer des bénéfices pour votre santé, aussi bien physique que mentale. Le problème, c’est que vous terminez souvent cette séance dans un état d’hypervigilance qui se prolonge jusque sur l’oreiller. Au lieu de tomber dans les bras de Morphée, vous discutez alors avec votre traversin pendant de longues heures. Frustrant.
La science tend pourtant à affirmer le contraire. Plusieurs études expérimentales publiées dans la dernière décennie concluent que l’activité physique à haute intensité réalisée en début de soirée ne perturbe pas le sommeil. L’exercice en améliore plutôt la qualité globale, réduit le délai d’endormissement et allonge la durée totale du sommeil profond au cours de la nuit. Les chercheurs derrière ces travaux pointent du doigt les effets antidépresseurs et anxiolytiques de l’activité physique pour expliquer cette relation. La température corporelle a aussi un rôle à jouer ; sa chute dans les heures suivant l’entrainement, après qu’elle ait augmenté, facilite le repos.
Un mythe tenace
Alors, pourquoi l’idée reçue voulant que s’activer en soirée nuise au sommeil perdure-t-elle ? Le diable est dans les détails. On sait, par exemple, qu’effectuer un entrainement dans les 60 à 90 minutes avant l’heure du dodo est associé à une qualité moindre du sommeil. En outre, le déroulement de la séance (ou, pire, du match) semble aussi important. Ainsi, certains athlètes de pointe, comme ceux de la Ligue nationale de hockey (LNH), avouent penser à leur performance plusieurs heures après une partie avant de trouver le sommeil. On imagine sans peine un sportif amateur « ruminer » ses intervalles, surtout s’ils ne se sont pas bien passés.
Plusieurs gestes anodins qui n’ont rien à voir avec la pratique d’une activité physique peuvent aussi s’immiscer dans l’équation et la fausser. S’exposer à de la lumière bleue en soirée ralentit la production de mélatonine, l’hormone du sommeil. C’est pourquoi vous devriez éviter de pitonner sur votre téléphone intelligent, votre tablette et votre ordinateur avant de vous mettre au lit. Consommer trop de caféine est également nuisible ; au-delà de 400 mg par jour (l’équivalent de trois tasses de café), l’insomnie vous guette. Les longues siestes durant le jour sont à proscrire. Gardez-les courtes, soit d’une durée d’environ 15 à 20 minutes. Programmez une alarme au besoin.
A contrario, inclure des exercices de relaxation dans sa routine présommeil peut grandement aider. Par exemple, optez pour des étirements statiques, de la méditation de pleine conscience ou des postures de yoga au sol (de l’enfant, du chat, du cadavre…). Le but : amener votre organisme à décompresser avant de vous glisser dans les draps. En plus, cela vous aidera à améliorer vos performances sportives. S’entrainer et bien dormir, c’est possible.
Performer après une mauvaise nuit de sommeil
Une étude publiée l’hiver dernier dans la revue savante Physical Activity and Nutrition a comparé les performances sportives de deux groupes d’athlètes : un qui a dormi 8 h, et l’autre qui n’a roupillé que 4 h 15. Le lendemain matin, à leur réveil, les capacités aérobie et musculaire de l’ensemble des sujets étaient semblables. En revanche, ceux qui ont connu une trop courte nuit s’épuisaient beaucoup plus rapidement durant un test d’effort à allure constante (85 % de la VO2 max). Ce n’est donc pas qu’une vague impression : un sommeil perturbé peut avoir un effet tangible sur l’entrainement le lendemain, surtout si ce dernier est effectué à bonne intensité.