Un trésor caché dans Portneuf

  • (photo Patrick Tardif)

C’est une merveille sauvage du Québec. Une forêt et un camping pour les vrais amoureux de nature. Un secret de 73 km2 bien gardé. Mais ça, c’était avant que Géo Plein Air n’y accède…

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Le silence. Ou presque. Quelques criquets, le rare cri d’un rapace ou d’une corneille. Le vent dans les branches qui craquent un peu. Logée dans ce prêt-à-camper du secteur des Lacs, j’allume un feu dans le poêle à bois dans le but de repousser l’humidité. Aujourd’hui est une journée pluvieuse et le mercure fraye avec les 15 °C. L’idée de me blottir près du feu et de dévorer une brique de 500 pages me tente, cependant je ne peux résister à l’appel des sentiers. J’enfile mon ciré et mes bottes de marche, prête à affronter les ondées.

J’ai devant moi cinq jours de camping et de rando en solitaire. Cinq jours où le parc me racontera ses arbres, comme le vieil érable à sucre là-bas, enviant ce mince bouleau blanc dont la sève coule vite et qui ne craque pas comme lui lorsque l’hiver vient le frapper de ses –30 °C. Les gorges granitiques me conteront la manière dont les glaciers les ont creusées il y a 1,2 milliard d’années. Les fleurs des bois me confieront leurs secrets amoureux avec les abeilles du fermier voisin. Les vingt-six lacs et deux rivières me diront peut-être qu’ils aiment sentir la glisse des canots sur leurs dos… Qui sait ?

Un petit détour par le chemin du cœur

J’ai rencontré le directeur ce matin, Sébastien Perreault. Il est derrière cette entreprise d’économie sociale qu’est le parc naturel régional de Portneuf, auquel il travaille depuis une quinzaine d’années, bien que le parc n’ait vu officiellement le jour qu’en 2014. « Tous les revenus sont réinvestis dans le but de soutenir la mission de l’organisme, qui est le développement durable du territoire ainsi que son animation éducative et récréotouristique. »

Cette initiative de préservation d’une aire naturelle et de son milieu fragile en même temps que de relance de l’économie locale me touche. « À la fin des années 1990, il y avait 34 maisons à vendre dans la municipalité de Saint-Alban, qui était complètement dévitalisée. Le niveau de scolarité était bas, et les jeunes s’exilaient en ville sans y revenir. Il fallait agir rapidement, stimuler le tourisme et communiquer notre amour pour notre coin de pays. »

Aidé d’un groupe de citoyens, Sébastien Perreault a forcé le destin. La centaine d’emplacements de camping et leurs services ainsi que les prêts-à-camper dynamisent le village. L’espoir renaît. Les maisons à vendre se raréfient. Saint-Alban encourage les nouveaux habitants à ouvrir des cafés, des lieux de culture ou d’art, en vue de diversifier l’économie. Pour le moment, c’est encore assez tranquille.

Du monde dévoué et vaillant, une belle nature, de l’espérance, des résultats. Ça me donne le goût de me balader dans les sentiers du parc naturel. Parce qu’après tout, ça ne se dit pas, ces choses-là, la beauté de la nature, tout ça ; ça se vit.

Ô cher sentier, je te foule avec bonheur !

Mes bottes aux pieds, j’emprunte le sentier des Cascades, une boucle de 3 km, histoire de me mettre en jambes. Comme il pleut à verse, je me réserve les plus beaux sentiers pour les prochains jours, espérant le soleil comme compagnon de marche. Sous les arbres, la pluie est atténuée. J’allonge mon parcours de 7 km en allant par le sentier des Chutes à Marcotte, qui n’a pas que les chutes à exhiber, mais aussi ses hautes parois rocheuses qui le rendent spectaculaire. Chemin faisant, j’aperçois les emplacements de camping rustique ; des idées de voyages à venir me passent par la tête…

Le lendemain, je choisis le sentier des Marmites, en raison de sa réputation, qui ne déçoit pas : vos enfants en seront fous. C’est un endroit où on ne serait pas surpris de croiser un lutin ou une fée. Après qu’un bras de rivière a été détourné, la végétation a repris possession des lieux. Les rochers, creusés par le courant, sont devenus des bassins vides emplis de mousse. Des arbres y ont élu domicile, adoptant des formes bigarrées. C’est époustouflant de beauté. C’est qu’elle a le sens artistique, dame Nature.

Le sentier des Sommets, que j’arpente le jour suivant, est soi-disant à l’intention des experts, du fait de son dénivelé de 163 m. Son tracé de 8 km est sinueux, rocailleux et très étroit… et le point de vue sur les environs vaut amplement l’effort.

Le sentier des Sept Merveilleux s’étire quant à lui sur 10 km et offre des perspectives sur plusieurs étendues d’eau. Quelques beaux cerfs et un grand pic à la distinctive huppe rouge se laissent voir. Cette piste, catégorisée difficile, devient le chemin de portage des canoteurs qui font le parcours de lac en lac.

Dans l’antre de la terre

Portneuf propose également de la randonnée souterraine. Les non-claustrophobes se jettent dans les entrailles du Trou du Diable, la deuxième plus longue grotte accessible du Québec : 980 m de corridors sculptés dans le calcaire. Le parcours spéléologique se divise en trois sections dont les difficultés vont en augmentant. Dans la phase finale, les explorateurs marchent à quatre pattes, complètement immergés dans l’eau à l’exception de la tête ; au-dessus de celle-ci, ils ne disposent que de 30 cm d’espace où chercher leur souffle… Une deuxième grotte, la Cascatelle, se situe sur le sentier du parc longeant la rivière Sainte-Anne ; beaucoup plus petite, de 19 m de longueur et 8 m de dénivelé, elle se prospecte sans guide, en famille.

Fuir la flotte…

Il pleut à boire debout ? Nul besoin de se creuser la tête afin de trouver une occupation qui ravira la famille. La région de Portneuf charme par ses nombreuses localités pittoresques. Le patrimoine historique est à l’honneur, et le terroir est mis en vedette dans les restaurants.

Deschambault-Grondines est des plus exquises : chocolaterie, ancien moulin à eau et bonnes tables telles que le bistro La Ferme, le resto-bar Chez Moi et la boulangerie Le Soleil Levain. On visite son église et son vieux presbytère sans oublier d’admirer la vue imprenable sur le fleuve Saint-Laurent. En face de l’église, à la p’tite Brûlerie, j’ai bu un excellent cappuccino accompagné de scones encore chauds.

Saint-Casimir aussi vaut le détour, pour sa microbrasserie Les Grands Bois où se produisent des artistes régionaux. Et puis il y a Saint-Raymond et sa fromagerie Alexis de Portneuf, Neuville et sa savonnerie. Entre les deux, à Pont-Rouge, le XIXe siècle a légué un moulin devenu salle de spectacle et la remarquable maison historique Déry. Quand c’est la flotte, on ne s’ennuie pas !

En bref

Randonnée pédestre, canot-camping, visite de grottes, camping rustique et aménagé, prêts-à-camper, chalets et des lacs à profusion.

ATTRAIT MAJEUR
Le camping sauvage

COUP DE CŒUR
Le sentier des Marmites

parcportneuf.com