SUP : Déferlante sur tout le Québec
Alexandre Pelletier se souviendra toujours de la première fois qu’il a marché sur les flots, debout sur une planche à pagaie. C’était à San Juan del Sur, au Nicaragua, un port de pêche sur le Pacifique, où l’eau est turquoise et le sable blond. « J’étais seul au large, en autonomie, lorsque des dauphins se sont lancés à ma poursuite, se
souvient le jeune homme. Ils sautaient à côté de moi comme dans un film. C’était féérique. »
Séduit par cette activité à mi-chemin entre les sports de pagaie (kayak, canot, etc.) et le surf, il échafaude dès lors un plan d’affaires afin de l’importer dans son coin du Québec, la région de Sorel-Tracy. Son entreprise, Passion Planches, naît peu de temps après, juste à temps pour la saison estivale 2016, et offre entre autres la location de planches à pagaie (ou surf à pagaie).
Le succès ne se fait pas attendre. De la fin de mai à la fin de septembre, ses acolytes et lui louent des planches, donnent des cours de yoga et guident des sorties d’initiation. En tout, environ 600 personnes de 8 à 70 ans cognent à la porte de Passion Planches dans le but de sillonner les îles de Sorel, un archipel de 103 îles au beau milieu du Saint-Laurent.
Une popularité manifeste
Alexandre Pelletier n’est pas le seul à surfer sur la popularité du stand-up paddle board (SUP). Depuis 2012, un raz-de-marée de petites entreprises consacrées à la planche à pagaie a submergé la province : Écho Aloha, à Morin-Heights, Pop Spirit, à Montréal, Kadanse, à Rimouski… Aujourd’hui, il est possible de goûter à cette discipline à peu près partout au Québec. Même la Sépaq s’y est mise, offrant l’activité dans 13 de ses parcs nationaux et stations touristiques.
Comme c’est souvent le cas, la vague d’engouement pour la planche à pagaie a pris forme chez nos voisins du Sud. Ce sont d’abord les surfeurs qui, s’inspirant des hommes de la mer polynésiens qui se transportaient ainsi, l’ont remis au goût du jour dans les années 2000. Peu après, le grand public s’y mettait ; selon l’organisation Outdoor Foundation, le SUP est l’activité qui a enregistré la plus forte croissance dans les dernières années, voyant son taux moyen de participation croître de 26 % de 2012 à 2015. Hugo Lavictoire, directeur général de Kayak Sans Frontières (KSF), est le premier à avoir pressenti cette déferlante. En 2008, il ouvre la première école québécoise de SUP dans la région de Montréal. Sa flotte est modeste à l’époque : à peine trois planches. Huit ans plus tard, KSF exploite désormais 6 sites, où 120 planches suffisent à peine à la demande.
Selon le formateur qui détient une certification de Pagaie Canada, c’est la polyvalence de l’activité qui a surtout conquis les amateurs. « La planche à pagaie est moins intimidante et plus “permissive” que le kayak et le canot. Elle est adaptable à souhait, on peut tout faire, pas juste de la randonnée », affirme-t-il. La preuve : KSF offre, à la même adresse, des cours de yoga et de conditionnement physique sur SUP ainsi que des retraites de SUP yoga d’une fin de semaine entre femmes !
Une activité répandue
À l’autre bout de l’autoroute 20, Jessica Fortin a elle aussi flairé la bonne affaire pour ce « nouveau vieux sport ». Dès 2012, elle lance La Plage Québec, qui offre d’abord des entraînements intérieurs sur planches de surf. Dans son studio ensoleillé à l’année, la jeune kinésiologue-entrepreneure accueille aussi bien des passionnés de sports de planche que des adeptes de conditionnement physique afin de mettre à rude épreuve leurs muscles stabilisateurs. Peu après, La Plage Québec se diversifie et investit les principaux cours d’eau de la région de Québec (baie de Beauport, lac Saint-Joseph, etc.) avec sa flotte de planches à pagaie nouvellement acquise. Parallèlement, Jessica met sur pied le Festival Surf & SUP, dont la première édition tenue en juin dernier à Lac-Beauport a attiré 500 amateurs de planche, de bonne bouffe et de feu de camp. La prochaine édition aura lieu le 17 juin prochain. À son avis, de tels événements – depuis l’année passée, le festival Montréal Eau Vive a aussi un volet SUP – témoignent de la vitalité de la discipline et de la ferveur de ses adeptes. « On crée des événements pour mettre en contact les pratiquants. On est rendus là. Sinon, ils resteraient seuls dans leur coin ! » explique-t-elle. Même son de cloche du côté d’Hugo Lavictoire. « La communauté est grandissante, nous avons atteint une masse critique. Elle cherche maintenant des prétextes pour se rassembler et démontrer son esprit festif, typique de la culture surf », analyse-t-il.
Pour poursuivre sa croissance, la planche à pagaie devra néanmoins relever plusieurs défis. Le principal : vaincre les (nombreux) préjugés à son endroit. Difficile à pratiquer, réservée aux « douchebags », inadaptée aux conditions climatiques du Québec… Nombreuses sont les étiquettes qui lui collent à la peau, constate Hugo Lavictoire. « Je recommande de trouver une école pour s’y initier. Tous constateront que n’importe qui peut pratiquer l’activité, pas mal n’importe quand. »
Autre défi : l’accessibilité aux sites de mise à l’eau. Le Québec a beau être doté de 400 000 lacs et rivières, ceux situés à distance raisonnable des grands centres sont ceinturés par des propriétés privées. Résultat : mettre des embarcations à l’eau, aussi légères soient-elles, relève parfois du chemin de croix.
C’est d’ailleurs la principale difficulté qu’a vécue Alexandre Pelletier, de Passion Planches. S’il a réussi à trouver un arrangement de dernière minute avec un organisme à but non lucratif œuvrant dans la région de Sorel-Tracy, il sait très bien que rien n’est gagné. « Nous aimerions organiser des pique-niques sur les plages des îles de Sorel, des randonnées au clair de lune. Pour ça, il va falloir se dénicher une véritable base d’opération », convient celui qui rêve grand.
SUP polo
Ce drôle de mélange entre la planche à pagaie, le water-polo et la crosse se pratique dans une aire gonflable, oppose deux équipes de quatre joueurs et consiste à marquer des buts à l’aide de pagaies spécialement conçues pour le sport. Au Québec, seule l’entreprise ChiCha SUP offre une telle activité.
www.chichasup.com
Course
À vos marques ! Prêts ? Pagayez ! Debout sur leurs planches longues et effilées, les athlètes rivalisent de force et d’endurance sur des parcours plus ou moins longs et techniques. Au Québec, le festival Montréal Eau Vive organise ce genre de compétition.
www.mtleauvive.com
Yoga/fitness
L’instabilité d’une planche à pagaie ajoute un élément de difficulté lorsque vient le temps d’enchaîner les asanas ou d’exécuter des squats. Gare à la chute dans l’eau
si vous perdez l’équilibre ! Chez KSF, une belle manière de se mettre en forme en pleine nature dans le cadre d’un cours de groupe.
www.ksf.ca
Cinq lieux où glisser sur les flots
Belœil
(Montérégie)
On voit le viaduc de l’autoroute 20, du bord de la rivière Richelieu. Les bateaux de plaisance qui nous envoient leurs vagues ajoutent au défi de se tenir sur l’une ou l’autre des planches offertes par SUP Stans, à Belœil. Pour suivre un cours ou louer une planche, c’est l’un des sites de planche à pagaie parmi les plus accessibles au sud de Montréal.
www.facebook.com/supstans
Grandes-Bergeronnes
(Côte-Nord)
Là où la Côte-Nord commence et où les baleines sont (presque) garanties, Mer et Monde Écotours offre des sorties guidées en planche à pagaie sur un fleuve qui, à cette hauteur, revêt des allures d’océan.
www.meretmonde.ca
Îles de Sorel
(Montérégie)
Avec ses rives formées de grands herbiers et ses marais sillonnés de petits canaux, on se croirait ici en Louisiane. Pourtant, nous sommes bien dans les îles de Sorel, à un jet de pierre de Montréal. La Maison du marais est l’entrée par excellence dans les « bayous de Sorel ».
www.maisondumarais.org
Rivière Saint-Charles
(Québec)
Long de plus de 30 km, ce cours d’eau prend sa source dans le lac du même nom, dans le nord de la région de Québec. On opte pour le premier tiers de la rivière, entre le barrage Cyrille-Delage, où on se stationne, et la rue de la Faune.
www.ville.quebec.qc.ca/citoyens/loisirs_sports/parc_lineaire
Île Charron
(Montérégie)
Pour la vue sans pareille sur la métropole, dont on oublie trop souvent qu’elle est entourée d’une ceinture bleue. Le parc de l’Île-Charron constitue une bonne base à partir de laquelle rayonner.
www.longueuil.quebec/fr/parc-ile-charron