Le grand rêve du Grand Nord
Le Concours Devenez Reporter, ça permet vraiment de s'éclater: ici, Michel Hellman a choisi de pondre un bédéreportage à la suite de son voyage dans le Grand Nord. Tout simplement unique.
Un voyage doit beaucoup à qui nous accompagne. À Michel Hellman, notre reporter enthousiaste et toujours partant, je dois une sacrée dose d’émerveillement. Pendant la semaine qu’a duré le reportage, je l’ai vu décliner tous les signes apparents de l’exaltation intense : brillance du regard, décrochage de la mâchoire, écarquillement des yeux. Sans parler de ces quelques mots qu’il a prononcés avec ferveur durant la semaine entière – C’est incroyable ! – devant un paquet d’expériences inédites : premier vol en Twin Otter, première randonnée dans la toundra, premiers caribous sauvages, premières aurores boréales…
Le Nunavik est un territoire inclassable, inqualifiable, parfois difficile, souvent complexe, toujours fascinant. C’était la deuxième fois que je m’y rendais pour faire un reportage et, cette fois encore, j’en suis revenue ébranlée, à mi-chemin entre l’enchantement et l’embarras. Il y a une douzaine d’années, je n’avais pas pu me rendre au cratère du Nouveau-Québec à cause de la météo et à cause du manque de temps pour y parvenir en motoneige. Le voyage avait été reporté à la semaine suivante et, malheureusement, le petit avion qui s’y rendait s’était crashé juste au-dessus du Pingualuk*, en emportant dans la mort quatre amoureux du Grand Nord, dont Yougan Vidal, un Allemand qui m’avait guidée quelques jours avant. J’avais été bouleversée par ce drame, et le souvenir de Yougan et de sa petite famille m’a hantée pendant ce second séjour au Nunavik.
Cette fois, Michel et moi avons eu le privilège de fouler le territoire du cratère et ses innombrables blocs de granit formés par l’impact de cette fameuse météorite tombée sur Terre voilà 1,4 million d’années. Un paysage de début ou de fin du monde, dépend du bout qu’on le regarde… Ce paysage lunaire a fortement inspiré Michel, illustrateur et bédéiste, qui dès son retour à Montréal s’en est servi pour alimenter son blogue (https://lifeinapanel.blogspot.com). Voici son reportage en bulles et en images, et son regard tout en nuances porté sur ce nord fascinant et austère.
*Le nom du lac formé par le cratère des Pingualuit.
Nathalie Schneider
En août 2008, lorsque j’ai appris que j’avais gagné le concours Devenez reporter pour Géo Plein Air et que j’allais m’envoler au nord du 61e parallèle, dans cet immense territoire sauvage qu’est le Nunavik, j’ai eu le sentiment de réaliser un grand rêve… Je me rappelle avoir rédigé à 13 ans une liste des choses que je voulais absolument faire avant mes 30 ans, et « voyager dans l’Arctique » figurait entre « inventer un nouveau mot » et « écrire un livre ». Rêver au Grand Nord, c’était imaginer un environnement à la fois hostile et grandiose, un lieu de solitude et de contemplation, une nature sauvage devant laquelle on doit se sentir humble.
Je suis donc parti avec Nathalie Schneider à la découverte du parc national des Pingualuit, le premier parc à être créé dans cette région. Avec son territoire protégé de 1133 km2, ce vaste parc, situé à l’extrême nord du Québec, a pour mission de préserver un environnement fragile tout en encourageant le développement d’un tourisme responsable et écologique. En cette fin d’août, nous étions parmi les tout premiers visiteurs, un grand honneur dont je suis très reconnaissant : je n’allais pas seulement voyager dans l’Arctique, j’y étais invité à titre d’explorateur !
Mais, malgré tout ce que j’ai pu lire sur le sujet ou tous les documentaires que j’ai vus, rien ne m’avait préparé au choc que j’ai ressenti lorsque j’ai atterri là-bas et que j’ai pu contempler de mes propres yeux cette immensité enivrante, cette luminosité si particulière, la beauté aride de la toundra, les couchers de soleil sur les lacs immenses, les aurores boréales… Et surtout, j’ai été frappé par la découverte d’une culture et d’un peuple que je pensais, à tort, connaître déjà : les Inuits.
J’ai eu l’idée de présenter mon reportage sous la forme d’une bande dessinée. C’est un média avec lequel je me sens à l’aise et qui me permet de retranscrire fidèlement mes impressions et mes observations, tout en y rajoutant une certaine légèreté. Les dessins reproduits ici ont souvent été croqués sur le vif dans mon carnet de croquis et témoignent directement de mon expérience dans ce nord du Québec encore si méconnu.