Route de la Soie /// Les anges de la route
Aux États-Unis, sur les sentiers de longue randonnée traversant le pays, les « trail angels » (anges des sentiers) passent en pickup et apportent une aide désintéressée aux randonneurs au long cours. De l’eau dans les parties arides, du transport d’un point à un autre, toutes sortes de choses extrêmement appréciées par les grands voyageurs qui ont pas mal d’obstacles à surmonter le long de leur chemin.
En Chine, ce sont des motocyclistes qui ont été pour moi des « anges de la route ». Deux fois je me suis trompé de route, et chaque fois un motocycliste m’a remis dans le droit chemin et m’a évité un long détour, qui aurait pu rapidement se transformer en déshydratation ou grande difficulté à me réorienter, vu la barrière de la langue.
Le chemin peut sembler assez simple, vu que je suis en gros la route G312 depuis le début. Sorte de route 66 qui traverse la Chine en s’enfonçant toujours plus loin vers l’Ouest, elle relie une grande variété de peuples et de contrées. En sortant de Xian, les bornes indiquaient environ 1500 km. À présent je m’approche de la borne 4000 km. Mais la G312 est capricieuse; elle perd son asphalte sur de grands bouts, se retrouve ensevelie sous l’autoroute 30 ou bien rencontre d’autres routes de manière pas toujours évidente.
La première fois que je me suis perdu justement, l’asphalte sur lequel j’étais continuait à droite et une route plus petite en terre partait à gauche. Le tout au milieu de nulle part et sans village ou autre repère à l’horizon. J’ai suivi l’asphalte sans me poser de question et moins de deux minutes plus tard, un motocycliste du coin (avec une moto qui ne dépassait pas les 40 km/h, il ne se déplaçait pas loin) me faisait signe que je faisais fausse route. Comment savait-il où j’allais ? A-t-il astucieusement deviné qu’un étranger dans cette région ne pouvait que suivre la 312 et venait donc de se fourvoyer ? En tout cas, il m’a rendu un grand service et je l’ai remercié profusément.
Hier, je me trouvais bien sur la G312. Mais apparemment elle était fermée plus avant. Tout d’un coup, un policier à moto vient rouler à mes côtés et me fait signe de m’arrêter. Comme souvent dans ce cas, je lui souris et… continue mon chemin. En général, c’est suffisant pour ne pas avoir à s’arrêter, montrer ses papiers et Dieu sait quoi.
Mais il insiste et donc je m’arrête. Ne comprenant rien de ce qu’il me dit, si ce n’est le ton plutôt aimable, je finis par lui dire où je vais et il me montre que la route est fermée plus loin et je dois faire demi-tour. Sur ce, il m’ouvre la voie, gyrophare allumé, écartant les rares autos surprises.
Revenant sur mes pas pendant plusieurs kilomètres, il finit par me relâcher à l’entrée de l’autoroute – qui, en passant, est clairement marquée interdite aux vélos. Je le remercie et il accepte très fièrement que je le prenne en photo. Il me confirme que Kashgar est par là, et je file sur l’autoroute sous son œil bienveillant. Il y a toutes sortes d’anges…